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mardi 6 février 2018

Je veux un enfant.


Avril 2017

   Je veux un enfant. Je veux des enfants. J'en ai toujours voulu mais ça n'a jamais été une obsession. Je savais que j'avais le temps et plein de choses à vivre avant ça. Et puis j'attendais aussi d'être un peu plus adulte - ou un peu moins enfant ! - Plus jeune j'étais persuadée que j'aurai mon premier enfant avant ma trentième année. Seulement, j'ai toujours dû repousser mon projet. Pas prête, pas de boulot, pas le bon timing, pas d'argent, pas le bon mec, plus de mec, trop de boulot... et puis un cancer. 
Jusque-là je ne me suis jamais mis la pression, je me disais juste que ça finirait par arriver, mais un peu plus tard que prévu dans mes rêves d'ado.

   Le cancer a tout changé. Comme je n'envisageais pas non plus de tomber malade avant ma trentaine, je me suis pris une sacrée claque quand il a été question de la fertilité. 

   Après avoir digéré la nouvelle du cancer, de son plan d'attaque, et des effets secondaires des traitements, nous avons abordé ce sujet avec l'oncologue. 
Les traitements anti-cancéreux sont toxiques et peuvent détruire la réserve ovarienne et donc altérer la fertilité. Donc on propose aux femmes qui vont recevoir ce type de traitements de prélever et congeler quelques ovocytes, histoire de les avoir sous la main – ou plutôt dans le congélo -pour plus tard. 
Comme il m'a fallu commencer la chimiothérapie en urgence, je n'ai pas pu bénéficier d'une préservation ovarienne de ce type.
À la place, il m'a proposé une préservation médicamenteuse par injection, qui permet de mettre le corps en ménopause artificielle, et donc le travail des ovaires en stand-by.
Bien sûr ce type de préservation est loin d'être efficace à cent pour cent mais j'ai tout de même tenté le coup. 
Tous les 28 jours petite piqûre dans la fesse par mon infirmière préférée ! 
Je me suis donc retrouvée en ménopause artificielle à 29 ans avec tout son lot de chouettes effets secondaires. Prise de poids, bouffées de chaleur, et humeurs changeantes... Bref entre ça et les effets de la chimio, un vrai régal ! 

   C'est à partir de ce moment-là que mon désir d'enfants n'a cessé de se faire entendre. Evidemment, c'est lorsque l'on vous annonce que peut-être vous ne pourrez jamais en avoir, que l'envie devient intarissable. C'est même devenu une angoisse : et si jamais je ne pouvais pas avoir d'enfants ? 

   À trente ans, vous êtes pile dans cette période où petit à petit, tout votre entourage vous annonce qu'un heureux évènement est attendu. Toutes ces nouvelles me remplissent de joie et accentuent mon angoisse à la fois. Mathieu a également un petit garçon, que j'aime de tout mon cœur. Mais moi aussi je veux vivre la grossesse avec ses joies et ses douleurs, moi aussi je veux sentir grandir ce petit être dans mon ventre, le mettre au monde, le serrer fort contre moi, sentir ses petites mains autour de mon cou, et le regarder s'épanouir ! 
Je sais aussi que si je ne peux pas porter mon enfant, il y aura d'autres solutions mais ce sera tout de même très dur à encaisser.

   Je ne peux pas rester sans rien faire à attendre la fin de mes traitements pour savoir ce qu'il en est. J'ai besoin d'en savoir plus sur les risques et savoir aussi d'où je pars. Est-ce que ma réserve ovarienne est déjà suffisante à la base ? Est-ce que je n'aurais pas déjà des soucis de fertilité à force d'avoir pris la pilule durant toutes ces années ? 
J'ai besoin de savoir maintenant à quoi m'attendre pour après ! Rien qu'à l'idée que le cancer puisse me prendre ma maternité, j'en ai les larmes aux yeux. A quoi bon survivre à ce fléau s'il m'enlève tant de bonheurs...

Isis, déesse de la fertilité

   Je prends donc rendez-vous avec LA spécialiste de la fertilité au CHU de Montpellier. Mon chirurgien lui a déjà parlé de moi. Elle est très douce et compréhensive. 
Elle prend le temps de me recevoir et de m'expliquer les effets de la chimiothérapie sur les ovaires, et le fonctionnement des différentes techniques de préservation. 
Malheureusement elle ne pourra pas pratiquer d'examens, ni faire état de ma fertilité à ce jour puisque j'ai commencé les traitements depuis plusieurs mois. Les résultats ne seraient absolument pas significatifs voir faussés. 
Elle me propose donc de revenir la voir dans les trois mois qui suivront l’arrêt de la chimio. 
Je passerai donc encore un certain temps dans le brouillard. Je suis déçue. 

   Quand est arrivée la fin de la chimio, ma tête était ailleurs. Chirurgie, radiothérapie, puis besoin de souffler et de m'éloigner le plus possible des médecins et des hôpitaux. 
Mais la question de la fertilité continuait à me hanter. 
En début d'année 2017, j'ai enfin pris le temps de prendre un nouveau rendez-vous au CHU. Et comme pour tous spécialistes, il faut toujours être patient. 

   Quelques mois et quelques prises de sang onéreuses plus tard, je vais enfin savoir. Ce rendez-vous m'inquiète beaucoup. J'ai peur. Mon cycle est enfin revenu c'est bon signe mais pas encore assez convaincant. Et avoir essayé de décortiquer les résultats de ma prise de sang ne m'a pas rassuré...
Je retrouve cette femme douce rencontrée il y a quelques mois. Déjà d'après elle la prise de sang est bonne. Ouf ! Je m'installe pour une échographie. 
Comme elle, j'ai les yeux rivés sur l'écran de l'appareil. Je guette de temps en temps les réactions sur son visage. Elle reste concentrée, je ne perçois rien. Elle reste un moment silencieuse. 
Elle finit par se tourner vers moi et esquisse un grand sourire. 
Elle me montre sur l'écran mes réserves d'ovocytes pour chaque ovaire. 

   Je repars de l'hôpital les larmes aux yeux. Ce sont des larmes de joie. La préservation par injection a fonctionné, ma fertilité n'a pas été altérée. J'ai une réserve ovarienne impressionnante pour une femme ayant subi de la chimio - Hallelujah ! -Je n'en reviens pas. Elle m'a aussi expliqué qu'avoir un enfant de manière naturelle était tout à fait possible mais, peut-être pas si simple, car les traitements ont tout de même eu des effets néfastes sur mon système reproductif. Il me faudra sans doute un petit coup de pouce. 
On verra bien, on essayera, tant que rien est impossible, ça me va !


   Je suis heureuse de partager cette nouvelle avec Mathieu. Puis avec mes proches. Je sais que ce n'est pas encore pour tout de suite. Il me faut attendre au minimum un an post traitements et notre situation n'est pas encore idéale mais maintenant je sais que ça arrivera. Un jour je serai maman.



Brigitte - Je veux un enfant




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