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samedi 6 janvier 2024

HUIT

Crédit Photo Delphine G Photographie

   Huit, ce chiffre il ne signifie rien pour toi, mais pour moi aujourd'hui, 6 janvier 2024, cela fait huit ans, que mon chirurgien m'a annoncé, appuyé sur mon lit d'hôpital, au réveil, encore anesthésiée que ce petit bout de rien du tout dans mon sein droit était un cancer. Huit ans, punaise (oui punaise est venu remplacer p***** depuis que ma fille parle) ! Il y a huit ans, je croyais mourir, j'amorçais un combat corps EN corps avec ce foutu crabe, un cinquante-cinquante, un seul survivant possible.

    Alors vous vous doutez de qui l'a remporté ! J'ai été la plus forte au jeu de la vie et aujourd'hui, huit ans plus tard, je savoure ma belle et simple vie. 

    Si je dois regarder en arrière, ces années passées, j'en ai parcouru du chemin vers la résilience.

    J'ai aujourd'hui l'immense chance de partager ma vie avec un homme fabuleux, j'ai deux beaux enfants en bonne santé, je vis au bord de la mer dans un cadre idyllique, j'avance dans ma carrière, on se façonne un nouveau nid à notre image et surtout on essaye de profiter de l'instant, d'être ici et maintenant. 



    Alors bien sûr rien n'est parfait, mais qui a besoin de la perfection ?

     Evidemment avec mon homme fabuleux, on se dispute mais qui a dit qu'il fallait toujours être d'accord ? On est aussi souvent "trop" fatigué, on oublie le truc important auquel il fallait penser, etc. et puis on se réconcilie, on permet a l'autre de se reposer et puis on rattrape les loupés ! On forme un binôme dans le quotidien comme au boulot ! Comme il le dit si bien de 18h à 8h je suis sa femme et de 8h à 18h son adjointe. On s'aime et on s'accepte tel qu'on est avec nos jolis défauts : moi et mon trop plein d'émotions, susceptible à souhait et toujours excessive. Lui et son impatience, ses mots maladroits et son besoin d'être rassuré. Ensemble on fait face à nos peurs, nos doutes, parfois dans la confrontation mais toujours avec amour et pardon. 


    Evidemment je ne suis pas une mère parfaite. C'est loin d'être facile, même la deuxième fois (comme j'imagine, la troisième ou la quatrième fois non plus). Tout est différent, de l'accouchement au contenu des couches. Et même si cette fois je ne suis plus seule, j'ai toujours mes doutes et mes angoisses. Mais lorsque je regarde mes deux beaux enfants échanger des sourires alors je me dis que je ne fais pas si mal, je ne suis pas si mauvaise malgré l'ascenseur émotionnel qui ponctue mes journées. J'oublie les dictas de la société, les mères parfaites d'Instagram, les conseils culpabilisants de l'éducation bienveillante qui nous martèle la tête à longueur de journée et je savoure l'instant.


    Evidemment vivre dans ce cadre idyllique à un prix. Je me suis éloignée encore un peu plus de ma famille et mes amis. J'ai renoncé aux petits bonheurs de la ville, une bière dans mon bar préféré même un soir de semaine, un ciné improvisé ou encore les livraisons Uber Eat de mes restos préférés les soirs de flemme. Mais quel bonheur les longues balades sur les rives du Ponant, les bains de mer même en novembre, les footings au milieu des flammants roses, moi et moi seule sur mon paddle. Moi qui ne supportait pas l'ennuie et la solitude, j'adore aujourd'hui ces petits moments où je me retrouve seule avec mes réflexions. 


    Alors oui, ces huit dernières années n'ont pas été faciles, ni celles d'avant d'ailleurs... J'ai vu ma mère combattre la maladie quand elle avait mon âge, puis ses invincibles démons jusqu'à disparaitre sept ans plus tard. J'ai vu mon père inconsolable mais si fort pour ses deux enfants. J'ai à mon tour vaincu un cancer en y laissant des morceaux de moi-même. J'ai perdu un grand-père, puis un frère. J'ai renoncé, j'ai quitté et je me suis retrouvée maman solo. Et j'ai vu ceux que j'aime souffrir et perdre des combats.

    Pourtant, aujourd'hui, même si parfois je pleure, si je doute, si certaines journées me paraissent insurmontables, je suis plus heureuse que je ne l'ai jamais été. J'aime et je me sens aimée. J'ai appris à porter un autre regard sur les évènements, à apprécier le bon et à tirer des leçon du mauvais. J'ai été accompagnée par mes supers coachs évidement, par mon homme et surtout je continue à apprendre et me remettre en question au travers de mes enfants, véritable reflet de ce que nous sommes.

    Regarder en arrière ne me plonge pas dans la tristesse, mais me fait prendre conscience de la chance que j'ai d'être là ici et maintenant. 



    Désormais lorsque le ciel est gris, je sais que finira par apparaitre un rayon de soleil éblouissant entre deux nuages.