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jeudi 8 juin 2017

34 séances de radiothérapie...



Peintures de guerre post séance radiothérapie 

18 Octobre 2016

   Quelques jours avant de commencer la radiothérapie, je récupère une liste de « coupeurs/barreurs de feu » auprès de la secrétaire de mon chirurgien. J'ai tout entendu à ce propos, du bien, du moins bien que ce soit par mon entourage ou par le personnel médical. Mais tout le monde a un avis à ce propos ! Jusque-là je n'y avais jamais eu recours mais j'en entends beaucoup parler depuis mon enfance. Quand tu viens d'un petit village, tu sais qu'il y a toujours un rebouteux ou un coupeur de feu ici ou dans le village voisin. Et tu entends toujours parler de leurs exploits : « il a réussi à soulager le frère du cousin de mon grand-père, incroyable, il n'y a plus rien, alors qu'il ne s'était pas loupé le corniaud ! » - oui, je vous la fais à la Solognote ... -

   Et a priori, à Montpellier, on a la chance d'en avoir même en ville, le luxe ! Bien sûr, je n'explique absolument pas comment quelqu'un - par je ne sais quelle force - peut enlever la sensation ou l'effet de brûlure. Mais, de toute manière, que ça fonctionne ou non, que ce soit réel ou pas, ça ne me fera pas de mal et ça vaut bien le coup de tenter l'expérience. En plus, fan de super-héros, ça me plaît de me dire que quelqu'un peut avoir un super-pouvoir de guérison !

   Retour à ma liste. Je barre d'avance tous ceux qui ont inscrit le prix de la séance en face de leur nom. À 30 euros la séance X34, je suis ruinée avant la fin du protocole ! J'appelle la première sur la liste qui n'habite pas trop loin de chez moi et de la clinique. Une petite voix douce et âgée répond au téléphone, le feeling passe bien.
J'ai donc rendez-vous avec elle, juste après ma première séance de radiothérapie.

   C'est le jour J, première séance mais pour de faux, on fait tout comme pour de vrai mais on « tire à blanc ».
La première séance permet de vérifier que les mesures ont bien été prises avec les repères tatoués, que je suis bien calée, et que le rayon tape bien au bon endroit en plein dans la face de « Tu-meurs » et ses potes et n'abîme pas -pas trop - le reste de mon corps !


Home sweat home ...
   Je suis un peu stressée par le début de ce nouveau traitement - effet de l'inconnu, encore une fois, je ne sais pas vraiment où je mets les pieds - mais bien moins que pour la chimiothérapie. Je pense que les rayons vont être une partie de « plaisir » à côté ! Mais j'ai tellement entendu de tout :
« Ce n'est rien les rayons, vous ne sentirez rien ! »
« Pour moi, ça a été bien plus dur que la chimio ! »
« J'ai été complètement brûlé par les rayons ! » 
J'essaye de ne pas trop penser à tout ça, chaque cas est différent, et j'ai essayé de prendre toutes les précautions possibles pour que ça se passe au mieux...

- Coupeuse de feu 
- Recette d'un onguent radioprotecteur 
- Tube grand format de Cicalfate d'Avène √
- Gelée d'Aloé Vera bio √
- T-shirt ample et soutif confortable √

 Je suis prête.
Je ne vais pas vous raconter chaque séance car à quelques détails près elles seront toutes semblables, toutes ces journées vont se ressembler, à nouveau comme dans le film Un jour sans fin. Je vais répéter 34 fois la même routine. Je vais 34 fois prendre une douche juste avant la séance pour que ma peau soit bien propre (ni crème, ni déo), 34 fois j'enfilerai des vêtements confortables, 34 fois je prendrai ma voiture pour me rendre à la clinique, 34 fois je patienterai plus ou moins longtemps (selon les jours) dans cette salle d'attente jusqu'à ce qu'on m'appelle, 34 fois je passerai cette porte, 34 fois je me déshabillerai dans cette cabine et me rendrai torse nu dans cette grande chambre froide, 34 fois je m'allongerai sous le cyclope, sur le dos les bras derrière la tête, 34 fois je me ferai manipuler, déplacer au millimètre près pour être exactement à l'emplacement où je dois être, 34 fois je verrai ce gros cyclope tourner tout autour de moi, 34 fois on m’irradiera pendant environ 10 à 15 minutes, 34 fois je vais avoir froid, 34 fois je fixerai les branches de palmier sur le plafond lumineux, 34 fois je fermerai les yeux au moment où j'entendrai les bips sourds et continus, puis 34 fois je me rhabillerai dans cette même cabine, 34 fois je me rendrai chez la coupeuse de feu, et 34 fois je me passerai mon onguent juste avant d'aller me coucher.

C'est ici derrière cette porte que le Cyclope opère...
   Mais je m'y fais, je compte à l'envers, plus que 33, plus que 32, plus que 31... jusqu'à ce que les trentaines deviennent des vingtaines, puis des dizaines, et puis que je puisse les compter sur les doigts de la main.
Je n'aurai pas mal du début à la fin. Je ne sens pas les brûlures, mon sein rougit, ma peau s'abîme, puis desquame, sur le sein et même dans le dos, comme un énorme coup de soleil mais je ne le sens pas.
Les séances chez la coupeuse de feu sont efficaces, les manips radio me demandent toujours si ça me fait mal et je réponds toujours que non. Tout va bien, je suis seulement lasse.
À la fin je ne supporte plus très bien de mettre un soutien-gorge, je n'en porte plus mais ce n'est pas douloureux, c'est plutôt comme une gêne et cela permettra de préserver ma peau brûlée.

   Chaque séance chez la coupeuse de feu se déroule de la même manière également. Ce petit bout de femme est un rayon de soleil dans mes journées monotones. Elle respire la générosité. Elle a un vrai don. Elle donne de son temps pour aider les autres sans besoin de contrepartie. Elle le fait car elle a le pouvoir de le faire. Son réel pouvoir ce n'est pas tant de couper le feu mais de prendre soin des autres. Elle m'accueille chez elle toujours avec un grand sourire, que je sois à l'heure ou non, elle m'installe dans son salon, je me déshabille et elle répète la même gestuelle en passant les mains sur mes brûlures, sur mon sein, autour et dans le dos, pendant 10 minutes. On discute de tout et de rien, elle me dit de ne surtout rien mettre, comme crème ou autre pour ne pas empirer la radiation. Elle me fait parfois goûter les fruits de son jardin d'Eden je crois qu'elle a également un don pour faire pousser les fruits, les légumes et les fleurs... - puis elle me raccompagne jusqu'au portail, on se dit à demain et je repars.

   Je suis presque bonne élève. Je ne mets pas de crème mais tous les soirs, je passe sur ma peau un onguent à base d'huiles essentielles fait maison. C'est ma tante qui m'a envoyé la recette, qu'elle tenait d'une amie à elle. Mélange d'huile d'amande douce, d'huile essentielle d'arbre à thé et d'Ylang Ylang. Ça sent un peu fort moi j'aime beaucoup, le chat un peu moins - du coup, je parfume tous mes draps et mes hauts de pyjamas. Le médecin m'a prescrit une crème mais je ne l'utiliserai pas. Je mets le moins de choses possible sur ma peau. Je m'hydrate et répare ma peau à l'Aloé Vera mais seulement de temps en temps et le soir après que les séances de radiations soient passées. La crème cicatrisante, je l'utilise pour masser mes cicatrices mais idem, toujours le soir, jamais avant les séances et pas tous les jours.
Je sais que j'ai eu beaucoup de chances que la radiothérapie se passe aussi bien pour moi, mais bon j'avais déjà bien morflé avec la chimio alors tant mieux, c'est ce qui m'a permis de m'accrocher, de tenir le coup aussi longtemps...



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